Vous êtes ici : Accueil > Doctorat > Soutenances > Thèses soutenues > Thèses soutenues LASSP
Cette thèse interroge les manières d’autoproduire, de s’approvisionner et de consommer des produits biologiques et locaux en milieu rural. Grâce à un parti pris méthodologique – l’ethnographie – et théorique – l’étude d’un espace social local – elle met en lumière la portée distinctive de ces pratiques alimentaires alternatives pour une petite bourgeoisie culturelle qui cherche à faire sa place au sein d’un territoire agricole, populaire et commerçant. La recherche s’attache tout d’abord à rendre compte de ce qui rassemble et divise ceux qui adoptent ces pratiques, essentiellement des femmes fortement dotées en capital culturel. Elle s’intéresse aux déterminants sociaux de l’adoption d’une consommation alternative en croisant leurs dispositions et les bifurcations de leurs trajectoires. La migration en milieu rural, qui caractérise le parcours de nombre d’enquêtées, est interprétée comme un reclassement social ayant des effets sur les conditions matérielles d’existence, les sociabilités, les manières de se placer et les modes de consommation, notamment alimentaires. Dans les lieux d’approvisionnement alimentaires alternatifs (AMAP et groupement d’achats) au sein desquels elles occupent des positions dominantes, ces « militantes du bio » participent largement au cadrage des « bonnes » manières de consommer autrement et au renforcement de l’entre-soi. À partir de ces pratiques émerge une critique en actes du capitalisme ancrée dans le quotidien, l’espace local et largement déconflictualisée. Cette politisation pratique s’opère essentiellement à distance des mouvements écologistes. Néanmoins, ce groupe occupe une position marginalisée dans l’espace social local dominé par la petite bourgeoisie économique. Dans cet espace rural du Sud-Ouest de la France, la légitimité des pratiques alternatives « ne va donc pas de soi ». Contestées sur les scènes marchande et politique locales, ces pratiques ne peuvent accéder à l’espace public et s’y maintenir qu’en ne s’affichant pas ouvertement comme alternatives aux normes des groupes dominants (mise en sourdine de la dimension critique, inscription dans les enjeux de développement du territoire). Au final, cette thèse met en exergue l’intérêt de penser les alternatives de manière relationnelle en replaçant ces pratiques dans les rapports de pouvoir qui leur donne leur portée distinctive. En prenant au sérieux les interdépendances entre groupes sociaux locaux, cette thèse étudie à nouveau frais le rôle joué par la consommation alternative dans la redéfinition des frontières entre fractions de classes. Ainsi, en « consommant ici et autrement » une petite bourgeoisie culturelle se constitue autour de pratiques distinctives sans pour autant parvenir à émerger localement (puisqu’elles restent largement invisibles et discréditées). Cette thèse repose sur un travail d’enquête ethnographique mené sur près de quatre ans au sein de lieux d’approvisionnement (des marchés, un groupement d’achats, une AMAP) et du réseau d’interconnaissance construit autour de ces espaces. Un questionnaire, des entretiens et des discussions informelles avec des adhérentes et des individus non-membres de ces associations, complètent les matériaux.
M. Eric DARRAS |
Université Toulouse Capitole |
Directeur de thèse |
||
M. Nicolas RENAHY |
Université Toulouse Capitole |
Co-directeur de thèse |
||
Mme Séverine GOJARD |
INRAE, ENS Paris |
Rapporteur |
||
M. Julian MISCHI |
INRAE, Université Paris Dauphine |
Rapporteur |
||
Mme Geneviève PRUVOST |
EHESS |
Examinatrice |
||
M. Jean-Baptiste COMBY |
Université de Paris 2 |
Examinateur |